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A qui appartiennent les CV des demandeurs d'emploi ?

Réduire le chômage de 10 % ! Lors de son lancement, en juin dernier, Qapa a placé la barre très haut. Pour réussir cette gageure, ce nouveau site d’emploi mise sur son algorithme de matching innovant mettant automatiquement en relation les souhaits et les compétences des candidats avec les besoins des recruteurs.

Mais il faut pour cela brasser un grand volume de données. Cofondatrice de Qapa, Stéphanie Delestre a fait

ses calculs (voir graphique). Sur 8,5 millions d’offres d’emploi publiées chaque année, 900 000 ne trouvent pas preneur. Comment réduire cet écart, sachant que 35 % des offres sont gérées par Pôle emploi ?

Qapa demande donc à accéder aux informations de Pôle emploi.  Confiez-nous les données des demandeurs d’emploi à qui vous ne parvenez pas à proposer d’offre, et nous nous chargeons gratuitement de leur trouver un poste , propose Stéphanie Delestre.

En mai et juin, Qapa a rencontré le cabinet de Xavier Bertrand, puis les services de Christian Charpy, patron de Pôle emploi. Depuis, pas de nouvelles. La réponse risque toutefois d’être identique à celle déjà essuyée par Keljob et d’autres job boards ayant, par le passé, émis des demandes similaires.

Directeur du département multicanal à Pôle emploi, Reynald Chapuis rappelle la position de l’agence.  La gestion des offres d’emploi et des données personnelles du demandeur d’emploi incombe à Pôle emploi. Nous les traitons et les diffusons en conformité avec la loi relative au respect des données personnelles instaurées par la Cnil.

Leur reprise sur un site tiers ne peut se faire, notamment en regard de l’investissement consenti. Les agents valident les offres avant toute diffusion. Est-ce que l’offre ne renvoie pas vers un système de vente pyramidale ou de numéro audiotel surtaxé ? Respecte-t-elle les conditions légales, notamment en termes de non discrimination ? Sur le terrain, l’agence valide aussi les conditions de l’exercice de l’emploi.

En ce qui concerne les CV, Pôle emploi garantit, comme pour les offres, leur  fraicheur    » si le CV n’est pas rafraîchi sur une période de trois mois, il n’est plus en ligne  » mais aussi la sécurisation de ces données nominatives.

Pôle emploi assure, enfin, le droit à l’oubli.  La recherche d’emploi correspond à une situation de vie difficile, estime Reynald Chapuis. Il est normal qu’un demandeur d’emploi qui retrouve une activité puisse demander à ce que l’on détruise les données que l’on a de lui ou qu’il supprime lui-même son dossier en ligne.

Si nous cédions nos données à un tiers, ou si, de manière malveillante, un site les récupérait sans notre accord, on ne maîtriserait plus le cycle de vie, ni la fraîcheur des informations confiées. Nous sommes garants de droits fondamentaux.

Enfin, ce service public repose, par essence, sur la notion de gratuité. Sous-entendu : contrairement aux intérêts de sites privés reposant sur un modèle économique basé sur la publicité, le dépôt d’annonces ou la consultation de CV.

Le Conseil national du numérique devrait prochainement émettre un avis sur le sujet. S’exprimant à titre personnel, Gilles Babinet, son président, se dit favorable à l’ouverture des données de Pôle emploi. Les sites d’emploi participent de la même mission d’intérêt général qu’est la lutte contre le chômage.

Certaines données publiques doivent rester propriétaires. Par exemple, c‘est le cas de celles d’IGN qui investit pour les produire. En revanche, l’investissement de Pôle emploi ne réside pas dans la production de données, mais dans la recherche d’emploi.

En ce qui concerne la confidentialité des données nominatives, Gilles Babinet propose que le demandeur d’emploi puisse, s’il le souhaite, rendre ses informations accessibles à des sites tiers en cochant une case en ligne.

Le groupe de travail open data du CNN devrait publier son pré-rapport mi-décembre. En attentant, Gilles Babinet se met à la disposition de Pôle emploi pour échanger sur le sujet.